La "chance" de voyager



Lors de mes voyages ces dernières années et la préparation de mon voyage à durée indéterminée, j’ai eu l’occasion de rencontrer de nombreuses personnes me disant que j’avais de la « chance » de voyager. Les mêmes arguments reviennent sans cesse : « j’aimerais faire comme toi mais tu as de la chance car tu es jeune/tu n’as pas d’enfants/tu as de l’argent/tu n’es pas engagée… »

Je voudrais par cet article montrer qu’il ne s’agit pas de chance mais de choix.

Alors il est vrai que je suis chanceuse sur certains points, je ne peux pas les ignorer. J’ai de la chance d’avoir la nationalité française et que mon passeport me permettent de visiter 160 pays dans le monde. J’ai eu de la chance d’avoir été élevée par mes parents dans le goût de la découverte, de l’ouverture d’esprit et de l’approche de son prochain. J’ai de la chance d’avoir un bon état de santé me permettant de me déplacer à mon bon vouloir.




 Pour le reste, il s’agit de faire un choix.

J’ai fait le choix de mettre le voyage, la découverte du monde et de l’autre au centre de mes priorités et d’en faire ma ligne de conduite. Ce n’est pas quelque chose qui est arrivé subitement dans ma vie mais qui fait sens pour moi depuis des années, même depuis mon adolescence. Et ma volonté de vivre ces expériences a été parfois confrontée à des obstacles, ce qui rend encore plus savoureux la possibilité de les vivre aujourd’hui.

J’ai voulu participer à un programme scolaire de 6 mois en Allemagne quand j’étais en Seconde. Malheureusement, mes résultats sportifs étant très bon à l’époque, mes parents ne voulaient pas que je perde le niveau acquis en France depuis des années. A 19 ans, avant d’intégrer une école d’assistante sociale, je voulais faire une année en tant que fille au pair en Angleterre. Cependant, mon petit ami de l’époque m’a demandé de choisir entre lui et mon projet, et qu’il ne m’attendrait pas pendant un an. A l’approche de mon diplôme, j’avais l’envie de faire une césure entre le monde des études et le monde professionnel mais la volonté de ne plus dépendre financièrement de mes parents et la routine installée avec mon petit ami ont été les plus fortes. Puis le train train quotidien avec la recherche régulière de travail au vu de la précarité des CDD, le paiement du loyer, des charges et crédits effacent petit à petit tes désirs d’évasion et de découverte.

Et un jour, tu te réveilles et tu te rends compte que tu n’es pas heureuse. J’ai 23 ans, je suis en couple avec mon petit ami depuis 5 ans avec lequel je suis pacsée. Nous vivons dans une grande maison avec jardin. Nos envies communes s’éloignent les années passant et nous ne faisons plus grand-chose ensemble. Sa sœur vient d’avoir une fille et bien sûr la question des enfants se présente à nous. Sa mère parle de mariage et de futurs petits enfants qui vont agrandir la famille. Et là, tu comprends que ce n’est pas la vision du futur que tu souhaites, que tu n’es pas heureuse dans ce modèle et que tout cela ce n’est pas toi tout simplement. Je fais donc le choix de sortir de ma zone de confort et de faire voler la soi disante sécurité matérielle et affective que j’avais pour retrouver l’épanouissement que j’avais perdu.

Après ma séparation, je fais mon 1er voyage en Pologne et je décide de le faire seule. En effet, à l’époque, aucune personne de mon entourage ne voulait aller dans ce pays ou ne pouvait pas avoir de congés en même temps que moi. Or, je ne voulais plus attendre que quelqu’un soit disponible pour réaliser mes désirs. Je m’étais mise en pause, oubliant mes désirs profonds, pendant 5 ans. Il était hors de question de reproduire cela. Je prends donc la décision de partir seule.

Et le choix de partir seule ces dernières années m’a permis découvrir un champ des possibles que j’avais à peine imaginer. Entre le dépassement des limites, la découverte de l’autre et des modes de voyages alternatifs que j’aborderai dans un futur article. Ces mélanges d’émerveillement, de défis et de révélations ont fait la personne que je suis aujourd’hui et a abouti à mon projet de partir sans billet retour.
  




A l’argument que j’ai de la chance de voyager car je suis jeune, je répondrai qu’il n’y a pas d’âge pour voyager. Lors de mon voyage en Irlande en 2016, j’ai croisé Pascale, une cinquantaine d’années, qui a lâché son boulot dans les ressources humaines pour faire un tour du monde. Et son sourire ainsi que sa soif de découverte ne lui faisaient pas regretter sa décision.

A l’argument que j’ai de la chance de voyager car je n’ai pas d’enfants, je répondrai que c’est un choix de vie que j’ai fait et qui correspond à la personne que je suis. J’ai fait le choix de ne pas avoir d’enfant, bien que cette décision soit bien souvent remise en question par les autres car il est encore difficile d’imaginer une femme sans enfant et que malheureusement à 29 ans, je suis encore capable de procréer. Ce sont souvent les personnes avec des enfants qui me sortent ce style d’arguments. Je ne pense pas, ou en tout cas je l’espère, que ces mêmes personnes regrettent d’avoir des enfants. C’est un choix de vie qu’ils ont fait et qui est sensé les épanouir. Et puis le voyage avec des enfants n’est pas incompatible quand on voit sur internet des blogs de familles qui partent des mois ou des années en itinérance en bateau, en train , en van, en vélo…

A l’argument que j’ai de la chance de voyager car j’ai de l’argent, je répondrai que j’ai fait le nécessaire pour économiser l’argent nécessaire à mon projet. J’ai quitté mon appartement et ai été hébergée par ma famille et mes amis pendant un an. Pendant cette année, ma maison était mon sac à dos et je pouvais dormir dans 4 lieux différents dans la même semaine tout en continuant de travailler. De même, j’ai réduit mes sorties et achats et poursuivi mon mode de voyage alternatif (autostop, dormir chez l’habitant, glanage…)

A l’argument que j’ai de la chance de voyager car je ne suis pas engagée, je répondrai que j’ai quitté un CDI sans regret pour poursuivre mon rêve. Je suis également propriétaire de mon appartement et continue de payer un crédit dessus. J’ai donc une agence qui s’occupe de mes locataires pendant mon absence et merci internet je peux rester joignable à distance en cas de souci.

Je me sens bien plus épanouie dans le mode de voyage que j’ai choisi, qui se veut au plus près de l’humain et faisant la part belle à la spontanéité et à la découverte de l’autre. Je n’ai pas de la chance de faire de belles rencontres, j’écoute mon instinct et fait preuve d’ouverture pour créer l’occasion de la rencontre. Beaucoup d’interactions entre humains passent par l’attitude et rien ne vaut un sourire pour entamer une discussion avec l’autre. Le nombre de portes qui m’ont été ouvertes par un sourire, une parole bienveillante, une envie de rencontre m’impressionnent encore.


 























Ne laissez pas la chance décider pour vous de comment vous aller vivre et pour cet article voyager. Faites en sorte de vous donner les moyens nécessaires à la réalisation de ce qui vous tient le plus à cœur. Cela peut demander des efforts et des sacrifices, cela peut faire peur, mais la satisfaction et l’épanouissement obtenus par la suite en vaudront encore plus le coup.

« Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque » René CHAR.


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